FINI, L’AVENT ?
Ben, oui ! L’avent c’est l’attente. On attendait Noël, les cadeaux, la rencontre de famille, les sept desserts… Noël, c’était hier. mais, en fait tout se passe généralement la veille. Le 25, on a plutôt besoin de se reposer ! Autant dire que c’est fini. Certains sont contents ; d’autres sont déçus. Cela ne s’est pas passé tout à fait comme ils l’avaient espéré. Mais c’est inévitable. Avec la présence de Georgette et de son pseudo mari, il fallait bien s’attendre à ce que les piques volent bas ! Oh ! c’était quand même pas mal. Vivement l’an prochain que l’on remette ça !
Il y en d’autres bien plus sérieux, c’est vrai. Ils ont vécu l’avent selon la liturgie. On n’a pas oublié d’allumer les bougies, les enfants ouvraient les petites fenêtres de leur calendrier de l’Avent, jour après jour sans tricher et y trouvaient une nouvelle gâterie. Surtout, on est allé à la messe de minuit. C’était pas mal, le sermon était assez court. Par contre, ils auraient dû chauffer l’église un peu mieux. Avec ce froid !
Et nous ? Ben, nous, on a trouvé une radio qui diffusait encore le fameux « Minuit, chrétiens ». De mon temps, toutes les radios du pays (bien sûr, il n’y en avait pas autant) le diffusaient à minuit pile. Maintenant, on s’en méfie. Vous vous souvenez ? « pour effacer la tache originelle et de son Père apaiser le courroux ». Est-ce qu’un Dieu bon peut être en colère ? Soit ! Malgré tout, c’est un très beau chant et, surtout, c’était une tradition. Tout se perd ! Mais nous, on y tient !
Vous m’avez compris, j’ironisais, le ‘nous’ ne nous est pas applicable. Redevenons vraiment sérieux ! En réfléchissant à l’Avent, qui signifie ‘venue’, du latin ‘advent’ d’où dérive notre verbe advenir, et qui est donc le temps d’attente et de préparation à cette venue, je me disais : Attendre, oui, mais quoi ? L’attente se termine-t-elle vraiment avec le 25 décembre ? Que représentent la venue et la notion d’attente dans la Bible ? J’ai envie de dire que tout est attente dans la Bible. Il y a ce que Dieu attendait de la création, ce qu’Il attendait d’Adam et des hommes après lui ; l’enfant qu’Adam et Ève attendaient après leur chute, après que Dieu eut dit au serpent : la postérité de la femme t’écrasera la tête… ? Les prophètes n’ont plus cessé de promettre la venue de la dite postérité. Une attente languissante : Ah ! si tu déchirais les cieux et si tu descendais… écrivait Ésaïe (64.1).
Et quand le Seigneur est enfin venu, Luc rapporte que Siméon, homme juste et pieux attendait la consolation d’Israël, et qu’Anne parlait de Jésus à tous ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem (Lc 2.25, 38).
Mais Jésus était venu et allait vivre 30 ans parmi nous… sauf que… la consolation d’Israël et la délivrance de Jérusalem n’ont pas suivi.
Le peuple, dans son ensemble, n’a pas reconnu son messie. Certains pensent que, dès lors, les promesses faites au peuple élu sont devenues caduques. Que celles qui ne se sont pas accomplies doivent être spiritualisées. Et qu’en réalité, toutes se sont, de fai, accomplies avec son ministère, sa mort et sa résurrection. Spiritualiser ? Il faut les spiritualiser, dites-vous ! Mais que veut dire la consolation d’Israël ? Que veut dire la délivrance de Jérusalem ? Et tous les rois de la terre qui montent à Jérusalem pour adorer l’Éternel, qu’est-ce que ça signifie? De quoi l’apôtre Paul parlait-il aux Juifs de Rome ; 25 ans plus tard, quand il disait : Voilà pourquoi j’ai demandé à vous parler ; car c’est à cause de l’espérance d’Israël que je porte cette chaîne ? Était-ce une espérance dépassée ?
Dépassée, celle de Zacharie 9 ? Car au-delà de la fausse entrée sur l’ânon, c’est le roi juste et victorieux qu’il avait promis et qu’ils attendaient. Et que faire du Fidèle et Véritable monté sur un cheval blanc et la guerre pour laquelle il vient et dont Jean aurait alors la vision plus de 50 ans après l’accomplissement ? J’oubliais, il faut spiritualiser. Mais comment ? Pardon ! J’ironise encore mais ce n’est pas avec aigreur. C’est avec tristesse.
Une autre attente me semble importante à souligner, en fait inséparable de celle d’Israël. Le prophète Ésaïe surtout, l’avait soulignée, lui, dans les chapitres 11 et 65 de son livre. Mais ce que je retiendrai, c’est ce que Paul en dit dans le chapitre huitième de son épître aux Romains. Il dit :
J’estime que les souffrances du temps présent ne sauraient être comparées à la gloire à venir qui sera révélée pour nous. Aussi la création attend-elle avec un ardent désir la révélation des fils de Dieu ! Car la création a été soumise à la vanité ― non de son gré, mais à cause de celui qui l’y a soumise― avec l’espérance qu’elle aussi sera affranchie de la corruption, pour avoir part à la liberté de la gloire des enfants de Dieu. Or, nous savons que, jusqu’à ce jour, la création tout entière soupire et souffre les douleurs de l’entendement. Et ce n’est pas elle seulement, mais nous aussi, qui avons les prémices de l’Esprit, nous aussi nous soupirons en nous-mêmes, en attendant l’adoption, la rédemption de notre corps.
C’est en espérance que nous sommes sauvés. Or, l’espérance qu’on voit n’est plus espérance : ce qu’on voit, peut-on l’espérer encore ? Mais si nous espérons ce que nous ne voyons pas, nous l’attendons avec persévérance (versets 18-25).
Ce texte est, à mes yeux, d’une importance capitale. Il rappelle que nous sommes dans le cadre, le temps, de l’espérance. Mais il est bien question d’espérance au sens biblique du terme. Pas grand-chose à voir avec l’espoir qui n’est qu’un vœu que l’on désire voir se réaliser selon la définition du Robert. Elle ne correspond pas du tout à ce qu’est l’espérance dans le langage de la foi. Le dictionnaire dit : « Sentiment qui fait entrevoir comme probable la réalisation de ce qu’on désire ». C’est à peine plus que l’espoir. Pourtant il y a, tout de suite après, le renvoi à des mots dont quatre en disent réellement plus : « Assurance, certitude, confiance, conviction.
Et notre texte va plus loin encore, disant : si nous espérons… nous l’attendons avec persévérance. Je vous propose cette définition : L’espérance est l’attente confiante et persévérante de l’accomplissement des promesses.
Pouvons-nous ne pas comprendre que la vie du chrétien est un Avent permanent, c’est-à-dire un temps d’attente et de préparation ? Mais il ne s’agit pas d’attendre n’importe quoi. Paul, dans notre texte a parlé de la révélation des fils de Dieu ? de l’affranchissement de la servitude de la corruption, de l’adoption de notre corps lui-même. Il est même allé jusqu’à parler de l’espérance du salut. J’ai une fois, en passant, commenté trop brièvement, entre autres ce verset et je sais que je n’ai pas été compris par tout le monde. Permettez-moi donc d’y revenir. Que veut dire Paul lorsqu’il dit : c’est en espérance que nous sommes sauvés ? Que notre salut n’est pas garanti ? Certainement pas. L’espérance est une conviction, une assurance, une certitude. De sorte que je puis dire : « Je suis sauvé ». Mais je dois ajouter que je l’attends, car mon salut inclut toutes les promesses et leur accomplissement, qui sont, pour la plupart, encore à venir. Par exemple, je puis être, par une démarche de foi, délivré du pouvoir du péché. Paul au verset 12 du même chapitre écrit d’ailleurs : …frères, nous ne sommes plus redevables à la chair, pour vivre selon la chair. Mais nous ne sommes pas encore libérés de la présence du péché. Dieu a fait de nous qui avons accueilli le Christ, de nouvelles créatures (plus exactement ‘créations’). Pourtant notre corps demeure soumis à la corruption. C’est pour un demain plus ou moins proche que nous attendons la rédemption de ce corps.
C’est encore dans le même chapitre que Paul affirme que Dieu nous a prédestinés (non à croire) mais à être un jour semblables à l’image de son Fils (v. 29).
Le sommes-nous ? … Dans un sens, oui, cela fait partie du salut. Cela nous est donc acquis. Nous l’avons, mais en espérance ! Dans le second chapitre de sa lettre aux Éphésiens, verset 6, Paul dit encore que Dieu nous a fait asseoir ensemble (païens et grecs croyants) dans les hauts cieux, en Jésus-Christ. C’est déjà spirituellement vrai, pourtant nous en attendons la pleine expérimentation.
À quelle expérience humaine pourrait-on comparer cela ? Je pense à quelqu’un que le sort aurait favorisé et qui reçoit un courrier recommandé lui annonçons qu’il a gagné la voiture mise au sort. La voiture lui appartient bien, même avant qu’il en soit informé. Pourtant il doit en attendre la réception pour pouvoir en jouir. Est-ce clair ? Tout nous est acquis en Jésus, mais nous ne le possédons encore que par la foi, en espérance.
J’ai envie, avant même d’en venir à la conclusion, de vous demander ce qu’est l’attente de votre existence. Je crois juste de penser que tout le monde attend toujours quelque chose et, parfois, s’y prépare plus ou moins. L’enfant attend d’être adulte parce qu’il imagine que c’est cela qui lui ouvrira tous les possibles ; le jeune homme attend la rencontre de l’âme sœur ; une fois mariés, les deux attendent l’enfant… On attend un travail, un meilleur salaire, les moyens de faire un voyage rêvé… que sais-je d’autre ? Mais aucune de ces attentes-là n’est solide. Ce sont des espoirs. On peut y croire, mais ils n’ont rien d’assurés.
Qu’apportera l’année proche ? Qu’en attendons-nous ? Nous avons mille raisons d’affirmer qu’elle ne nous apportera aucune garantie de rien. Même un gouvernement moribond parvient encore à faire adopter de nouvelles lois iniques, à durcir la dictature de la pensée. Nos libertés sont de plus en plus grignotées ; la faillite de notre pays devient difficile à cacher. Savez-vous que chaque enfant qui naît en France avait déjà, en 2016 une dette de 38 000 euros (je n’ai pas les derniers chiffres,mais ils sont effrayants. Et savez-vous que, depuis le premier janvier de la même année, votre banque peut puiser dans vos épargnes (si, par malheur, elles représentent plus de 100 000 euros), pour éviter une banqueroute et pouvoir continuer à prêter à l’Etat ! On l’a voté, l’été 2015, comme on vote ces choses-là, pendant que vous étiez en vacances et par voie d’ordonnance. Nul n’a de quoi pavoiser !
Est-ce tout ? Non, hélas. La fonte des glaces s’accélère, bien des villes côtières sont menacées par la montée des eaux. Les conflits internationaux se multiplient. L’État Islamique a déclaré la guerre au monde et la troisième guerre mondiale a commencé. Le flot des migrants fournit l’occasion d’y introduire aisément sa troisième colonne et leurs prochains tueurs. On ne sait plus que faire ? D’autant que s’y ajoute les cataclysmes naturels annoncés par l’Apocalypse de Jean comme les châtiments de Dieu.
Le réveillon d’avant-hier que tant attendaient sans motif glorieux et le noël de hier vont-ils y changer quelque chose ? Combien l’apôtre avait raison quand il écrivait : Si c’est dans cette vie seulement que nous espérons en Christ, nous sommes les plus malheureux de tous les hommes (1 Co 15.19).
C’est là, vous l’avez compris, que j’avais envie d’en venir.
Jésus, dépeignant les drames de la fin des temps dans ce qu’on a appelé sa petite apocalypse, disait : Quand vous verrez ces choses arriver, redressez-vous et levez vos têtes, parce que votre délivrance approche (Luc 21.28) ?
C’est bien l’invitation à n’attendre quelque chose que d’en haut, à regarder aux promesses divines, les oreilles bouchées à celles d’un monde trompeur encore toujours régi par le prince de ce monde, celui que Jésus appelait le père du mensonge et le meurtrier dès le commencement. Rien à espérer de ce côté-là.
Le chrétien qui prend au mot les promesse divines n’attend rien d’en bas, tout d’en haut. Aussi les crises, même les plus graves ne peuvent lui ôter la joie de savoir qu’en toutes choses, il faut considérer la fin. De n’être pas de Salomon, ce proverbe n’en est pas moins vrai, car il y a la fin des temps mais aussi ce qui suit, le but. ‘Fin’ et ‘but’ sont un seul mot en grec. Ce qui ‘tombe bien’ si cela doit quelque chose au hasard !
Seulement voilà, les premiers chrétiens attendaient déjà le retour pour leur génération et près de vingt siècles se sont écoulés. Il n’est toujours pas là. On l’attend et rien ne vient. Les railleurs disent : Où est la promesse de son avènement ? Car depuis que les pères sont morts, tout demeure comme au commencement (2 Pi 3.4).
Oui, l’avènement se fait attendre. Il y a eu à cela plus de raisons ensuite qu’il y en avait quand Pierre écrivit cela. Ce n’est pas ici le lieu de les développer. Mais la réponse de Pierre n’a rien perdu de sa pertinence : Le Seigneur ne tarde pas dans l’accomplissement de la promesse comme quelques-uns le croient ; mais il use de patience envers vous, n’ayant décidé, pour personne qu’il périsse mais bien plutôt que tous aient accès à la repentance (2 Pi 3.9).
Rien ne semble venir… tout demeure comme… même pas, de fait, tout empire ; tout est de plus en plus catastrophique.
Dans la parabole des dix vierges, c’est le fait que l’époux tardait qui les avait amenées à s’endormir. C’est pourquoi tant d’exhortations du Nouveau Testament sont des appels à veiller. Mais, surtout, voilà pourquoi, dans notre texte principal, Paul appelle l’espérance « une attente avec persévérance ».
Nous avons mentionné ce dont il est dit, dans notre Bible, que c’est ce qui est promis que nous avons à attendre. Il s’agit de ce qui nous est promis, à nous païens convertis au Christ, certes, mais aussi ce qui a été promis à la création ― elle soupire en l’attendant ― et à Israël. Ces promesses-là aussi, nous avons besoin de les attendre. Je dois le redire parce que, par souci de taire les choses qui peuvent nous diviser pour favoriser ce qui nous est commun, le sujet des fins dernières a été banni de nos écoles bibliques et de nos facultés de théologie et sont donc de moins en moins présentes dans nos chaires. La perte est incalculable. Ces questions représentent peut-être au moins les deux tiers de notre Bible. On fait comme si la seule chose à attendre était de mourir pour être avec le Seigneur ― mais qu’est-ce qu’on entend par là ? ― ou bien qu’Il revienne ― mais on sait encore moins ce que cela signifie. On propose : Il vient, il juge les vivants et les morts, les uns sont avec lui à jamais, les autres pour jamais loin de lui. C’est simple, c’est clair. Rien d’autre à attendre. Pas besoin de prier pour la paix de Jérusalem. Pas besoin de réciter la prière dite dominicale. Car à quoi bon demander à Dieu que son règne vienne puisque, paraît-il, nous sommes dans le millénium depuis la résurrection du Christ.
Je pense à un exemple que j’aurais pu citer précédemment, parmi les choses présentes mais à attendre. L’épître aux Hébreux, au chapitre 2, affirme en effet que toutes choses ont été soumises au Christ, mais ajoute : Nous ne voyons cependant pas encore que toutes choses lui soient soumises (v. 8).
Les choses ont-elles changé depuis que l’auteur de cette épître a écrit cela ? Certainement pas. C’est pourquoi cela fait partie de notre attente persévérante. Le jour vient où, selon Apocalypse 11.15-17, quand le septième ange aura sonné de la trompette, il y aura, dans le ciel, de fortes voix qui diront : Le royaume du monde est remis à notre Seigneur et à son Christ. Et les vingt-quatre vieillards assis devant Dieu sur leurs trônes, se prosterneront sur leurs faces, et adoreront Dieu, en disant : nous te rendons grâces, Seigneur Dieu tout-puissant qui es et qui étais, de ce que tu as saisi ta grande puissance et pris possession de ton règne.
Avons-nous conscience que notre propre rédemption acquise à la croix, mais que nous attendons dans toutes ses conséquences, est aussi liées à ce règne qui vient, à la conversion et la restauration d’Israël et la délivrance de Jérusalem ? On ne peut, d’un trait de plume, ni d’aucune autre manière, rejeter la moindre des promesses divines.
Plus nous comprendrons ce qui est en train de se passer, plus notre espérance sera affermie et persévérante. Même si pas mal d’années devaient encore s’écouler avant l’accomplissement, ne perdons jamais de vue la perspective de son avènement. Ne pesons les choses d’ici-bas qu’à cette aune-là. Rien ne nous rendrait plus malheureux que de mettre notre espoir et notre attente dans les seules choses passagères de notre âge.
Puisque j’ai mentionné la prière dominicale, il faut avouer que cela n’a guère de sens de demander à Dieu le pain quotidien dans notre contexte d’abondance. Il me semble même que c’est faire injure aux deux tiers des habitants de la planète qui ont littéralement faim. Mais tout doit nous pousser à faire nôtre le début de cette prière juive, en la faisant au nom de Jésus-Christ pour supplier que son règne vienne, que sa volonté soit enfin faite sur la terre comme elle est faite au ciel.
Courage, frères, des temps difficiles sont devant nous, et le Covid a tout compliqué encore. Mais le meilleur vient ensuite. N’arrêtons pas l’Avent, attente et préparation, non pour le prolonger en vue d’une autre fête annuelle, mais comme le seul Avent véritable, celui qui fera place au grand Jubilé final, à la fête extraordinaire du retour de notre Seigneur. En attendant, ouvrons, jour après jour, les fenêtres du calendrier de cet avent-là. Nous y découvrirons, chaque fois, au moins l’une des manifestations journalières de la bonté et de la fidélité de notre Sauveur et Maître !
Les constations premières étaient plutôt sombres, mais les perspectives pourraient-elles être plus lumineuses ?