LES CHRETIENS SONT-ILS TOUS SACRIFICATEURS ?
TOUS REGNERONT-ILS ?
Cette question m’ été posée en 2016 et a été oubliée peu après, mais n’a été guère lue. Je la reprends donc parce qu’elle me paraît fort importante plus encore aujourd’hui qu’il y a 8 ans
Ma question est venue suite à une lecture de Apocalypse 5.8-10, référence donnée par le pasteur H. Wyttenbach dans une étude sur l’eschatologie.
Au versets 9-11 je lis « ...Et tu as racheté pour Dieu par ton sang des hommes de toute tribu, de toute langue, de tout peuple, et de toute nation ; tu as fait d’eux un royaume de sacrificateurs pour notre Dieu, et il régneront sur la terre.
H. Wyttenbach lie ce passage à 1.Pi 2.9 disant « Ce dessein s’applique à l’Eglise ».
Sommes nous sacrificateurs ? Devons-nous régner ?
J de B.
Ma réponse:
Le rôle de prêtres, sacrificateurs et prophètes a été confié à Israël. Tu as bien fait, à cet égard, de te reporter à l’Ancien Testament. Exode 19.6 est clair. Dieu dit à Moïse : Vous serez pour moi un royaume de sacrificateurs et une nation sainte. Telles sont les paroles que tu diras aux enfants d’Israël.
Évidemment, on peut rappeler que le peuple d’Israël a été tiré d’entre tous les peuples, plus exactement du milieu des nations (Ac 15.14). Mais il ne peut, pour autant, représenter à lui seul la foule qui loue l’Agneau en Ap 5 !
Or, il est certain que ce verset d’Apocalypse qui te préoccupe affirme que le rôle de prêtres et de rois devait être étendu à des hommes de toute langue. Comment ? Par le biais des prosélytes, il me semble.
Un prosélyte est un païen gagné à la foi juive et acceptant d’être assimilé à ce peuple. Quand l’église judéo-chrétienne de la période des Actes vit le jour, les Juifs, dans leur souci de se garder pur des mélanges avaient depuis longtemps perdu de vue que s’ils étaient le peuple élu, donc mis à part, ce n’était pas pour leur propre bénéfice, mais en vue d’être des sacrificateurs, au service des autres nations. Toute la période des Actes ne fut même pas suffisante pour qu’ils le comprennent vraiment. Le chapitre 13 nous rapporte, par exemple, la tentative que fait Paul de le leur faire comprendre, spécialement le verset 47 : Ainsi nous l’a ordonné le Seigneur : je t’ai établi pour être la lumière des nations, pour porter le salut jusqu’aux extrémités de la terre. C’était le but, la raison d’être de la mise à part de la nation juive. Or, un prosélyte avait les mêmes privilèges qu’un Juif, donc le même ‘mandat’.
Venons-en à 1 Pierre 2.9. Wyttenbach lie ce texte à l’Eglise. A-t-il raison. Avant de donner un avis, il faudrait savoir de quelle église il parle. Si c’est de l’église judéo-chrétienne, c’est une évidence. Car c’est à des Juifs d’origine ou prosélytes que Pierre écrit : …ceux qui sont dispersés dans le Pont, la Galatie, la Cappadoce, l’Asie et la Bithynie, et qui sont élus…(les Juifs de la Diaspora !). De plus, ce caractère est souligné dans le passage lui-même qui les nomme : un sacerdoce royal, une nation sainte…L’église au sens où on utilise couramment le mot n’est sûrement pas une race (ou ethnie) ni une nation.
Mais ce peuple, car ce mot lui est aussi appliqué, englobe en même temps la multitude de païens convertis, qui, dès lors, partagent le même espérance qu’Israël (Ac 28.20) : l’établissement du Royaume, le rétablissement de toutes choses… et le même mandat (Mtt 28.19) : l’évangélisation du monde.
Quant à Jean, lorsqu’il écrit l’Apocalypse, il le fait en qualité d’apôtre des circoncis écrivant principalement à des Juifs avec cette perspective-là. Quand on lit 2.9, il me semble normal de voir qu’il parle de « faux prosélytes » (ceux qui se disent Juifs et qui ne le sont pas, mais qui sont une synagogue de Satan).
Ta question : « Sommes-nous sacrificateurs ? Devons-nous régner ? »
Dans un certain sens, voire un sens certain, est sacrificateur quiconque prend au sérieux l’intercession auprès de Dieu en faveur des hommes. Mais c’est s’inscrire dans la ligne du mandat d’Israël, ce n’est pas prendre sa place, comme on le prétend souvent, aujourd’hui…
Quant à régner, la question est un peu plus complexe, pourtant claire. Tout l’enseignement du Nouveau Testament montre que partager l’héritage du Christ, tel qu’il est défini au Psaume 2, versets 8 & 9, est réservé aux seuls vainqueurs. Voir, à ce sujet, les destinataires des promesses faites aux sept églises d’Apocalypse 2 et 3 : À celui qui vaincra…ou la mention de couronnes (Ap 2.10, à celui qui est fidèle jusqu’à en mourir ; 2 Ti 4.8, à Paul et ceux qui aiment l’avènement ; Ja 1.12, à ceux qui aiment Dieu) ou encore Ap 20.4, 5 qui réserve le règne aux martyrs qui auront refusé la marque de la bête et auront été décapités pour le nom et la Parole du Seigneur.
Et il faudrait aussi citer Romains 8.17… (à condition de respecter l’original), qui dit les héritiers de Dieu, aussi co-héritiers du Christ, si, du moins, ils souffrent avec lui pour être glorifiés avec Lui.
La promesse du règne avec Christ est donc clairement conditionnelle.
J’ajouterai une seule remarque. Mais elle me paraît importante. Les chrétiens adultes qui se sont reconnus comme membres de l’Eglise qui est le corps même du Christ, ne peuvent que régner avec Lui, bien que différemment. Car ce n’est pas la tête seule qui régnera. Là où sera la tête, là sera aussi le corps. Cette église est d’ailleurs déjà avec Lui, spirituellement parlant, à la droite de Dieu (Ep 1.20 et 2.6) où se trouve la tête. Elle sera manifestée avec Lui quand il sera manifesté (Col 3.3,4).
Dès maintenant, on ne peut séparer le corps de la tête.
Ceci me semble répondre à ta question.
Que Dieu te comble