SERVIR DIEU ET LES SIENS
Celui qui vous reçoit me reçoit, et celui qui me reçoit, reçoit celui qui m’a envoyé. 41Celui qui reçoit un prophète en qualité de prophète recevra une récompense de prophète, et celui qui reçoit un juste en qualité de juste recevra une récompense de juste. 42Et quiconque donnera seulement un verre d’eau froide à l’un de ces petits parce qu’il est mon disciple, je vous le dis en vérité, il ne perdra point sa récompense.
Matthieu 10.40-42
Mais, si quelqu’un scandalisait un de ces petits qui croient en moi, il vaudrait mieux pour lui qu’on suspendît à son cou une meule de moulin, et qu’on le jetât au fond de la mer.
Mtt 18.6
Et le roi leur répondra: Je vous le dis en vérité, toutes les fois que vous avez fait ces choses à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous les avez faites.
Mtt 25.40
Car, comme nous avons plusieurs membres dans un seul corps, et que tous les membres n’ont pas la même fonction, 5ainsi, nous qui sommes plusieurs, nous formons un seul corps en Christ, et nous sommes tous membres les uns des autres.
Romains 12.4-5
Par amour fraternel, soyez pleins d’affection les uns pour les autres; par honneur, usez de prévenances réciproques. 11Ayez du zèle, et non de la paresse. Soyez fervents d’esprit. Servez le Seigneur. 12Réjouissez-vous en espérance. Soyez patients dans l’affliction. Persévérez dans la prière. 13Pourvoyez aux besoins des saints. Exercez l’hospitalité.
Rm 12.10-13
Nous avons entendu un des versets les plus sévères de l’Ecriture : Si quelqu’un scandalisait un de ces petits qui croient en moi, il vaudrait mieux pour lui qu’on suspendît à son cou une meule de moulin, et qu’on le jetât au fond de la mer. Qui l’a prononcée ? Jésus. Elle est choquante, disons-le. Elle s’explique par ce que le N.T. appelle un ‘mystère’, je veux parler de l’union qui existe entre Jésus-Christ et ses disciples, les membres de son corps. Cf. Je suis Jésus que tu persécutes... (Ac 9.5).
- UN PRIX ÉLEVÉ !
De notre lecture en Romains 12, je voudrais retenir tout d’abord le v. 10.
La première partie de ce verset est simple. Par amour fraternel, soyez plein d’affection les uns pour les autres. L’expression ‘amour fraternel’ rappelle que les relations dont il est question ici sont celles qui lient les chrétiens entre eux. L’expression les uns les autres le confirme (1 Th 4.9). Elle indique la dimension de la réciprocité, d’interdépendance qui est le propre des membres d’un corps, comme il est dit aux versets 4 et 5. La TOB parle d’une mutuelle affection.
La deuxième partie de ce v. 10 est moins parlante à première lecture. Par honneur, usez de prévenances réciproques. Le mot ‘honneur’, en grec, se réfère à la valeur, au prix. On pourrait transcrire ce verset ainsi : « Comme de précieuses porcelaines, usez de délicatesse pour ne pas vous ébrécher les uns les autres. Agissez avec égards, ne vous heurtez pas, faites grande attention ! » La TOB dit : « Rivalisez d’estime réciproque ».
Le contexte de ce passage autorise à dire ceci : la valeur élevée qui est évoquée ici n’est pas tant liée à la nature humaine de chacun qu’à la nouvelle identité d’enfant de Dieu, de membre de Christ de chaque chrétien (cf. les v. 4 et 5). Cela est plus qu’évident quand on lit les lettres de Paul avec attention. Cependant, nous vivons dans un monde qui a d’autres références, d’autres critères de jugement, qui ne peut pas comprendre cela – et cela devient difficile à comprendre et à accepter par nous aussi.
Il est vrai qu’à l’apparence, la différence entre un chrétien et quelqu’un qui ne l’est pas ne se voit pas toujours ! Mais que dit l’apparence ? Jésus aussi était sans apparence… Il n’empêche que la différence est très grande, plus grande que ce que nous pensons. Les Israélites ressemblaient à tous les autres hommes, mais Dieu leur a dit : Qui vous touche touche à la prunelle de mon œil (Za 2.8).
Quand Jésus dit : Quiconque scandalise un de ces petits qui croient, le mot ‘petit’ dit : sans apparence ; et l’expression : ‘qui croit’ dit une très grande différence ! Les chrétiens que Saul de Tarse mettait en prison devaient ressembler à tous les autres hommes de leur temps, mais Jésus bouleversera le futur apôtre en lui disant : Je suis Jésus que tu persécutes ! » (Ac 9.5).
- SERVIR DIEU ET LES FRERES
Nous pouvons faire un pas de plus avec ce passage en remarquant une étonnante alternance entre les versets qui touchent à la relation avec Dieu et les versets qui touchent à la relation avec les frères et sœurs dans la foi :
Soyez pleins d’affection et d’estime réciproque (v. 10) ; Servez le Seigneur (v. 11) ; Persévérez dans la prière (v. 12) ; Pourvoyez aux besoins des saints (v. 13).
Voilà un bel équilibre, diront certains : Dieu / les autres ; la prière / l’action…
Mais il ne s’agit pas de cela : il s’agit de deux engagements indissociables, deux communions qui, en réalité, n’en font qu’une, comme un fruit commun de la même grâce, de la même foi.
L’apôtre Jean dit et redit cela à plusieurs reprises : Si quelqu’un dit : J’aime Dieu, et qu’il haïsse son frère, c’est un menteur ; car celui qui n’aime pas son frère qu’il voit, comment peut-il aimer Dieu qu’il ne voit pas ? (1 Jn 4.20. Cf. 2.9-11 ; 3.17-18).
Que d’atténuations n’a-t-on pas entendues en appliquant ces principes à l’ensemble des hommes – avec, notamment, l’interprétation incorrecte de la parabole du jugement des nations (Mt 25.40) qui transforme la marche chrétienne et le témoignage du Royaume de Dieu en une vague utopie ! Quel droit avons-nous d’adapter ainsi le message biblique à notre guise, délaissant les références de la Parole de Dieu pour celles de l’humanisme ambiant ?
Que certaines questions demeurent sans réponse, cela est bien possible. Que la générosité accompagne sans cesse notre démarche dans un esprit d’ouverture, cela est nécessaire. Mais jamais la Bible n’associe les membres du peuple de Dieu et l’ensemble des hommes pour en faire un seul ensemble. La notion de communion est toujours et exclusivement attachée à Dieu et à ceux qui lui appartiennent. Le repas du Seigneur le dit bien.
Corneille, centenier romain, était un homme pieux et craignant Dieu, dit Luc. Comment le savons-nous ? Il faisait beaucoup d’aumônes au peuple et priait Dieu continuellement (Ac 10.1-4. Cf. Lc 7.2-10). Le peuple, ici, c’est le peuple de Dieu.
Nous devons comprendre ce ‘mystère’ : ce que l’on fait à un membre du peuple de Dieu, en bien ou en mal, on le fait à Dieu. Ce que l’on fait à un membre de Christ, en bien ou en mal, on le fait à Christ. Rappelons-nous la parole étonnante de Jésus : Je suis Jésus que tu persécutes (Ac 9.5). Saul persécutait des chrétiens…
Il y a à cela beaucoup d’implications. Certaines devraient nous faire peur (ne pas faire de mal) ; d’autres devraient nous faire envie (faire du bien !), comme ici (Hé 6.10) : Dieu n’est pas injuste pour oublier votre travail et l’amour que vous avez montré pour son Nom, ayant rendu et rendant encore des services aux saints.
Priez sans cesse ! Pourvoyez aux besoins des saints ! C’est le même cœur, le même amour, le même fruit de la grâce, la même foi !
- POURVOYEZ AUX BESOINS DES SAINTS
Nous retrouvons cela au chapitre 15. L’apôtre Paul écrit : Maintenant je vais à Jérusalem pour le service des saints. Car ceux (les chrétiens) de Macédoine et d’Achaïe ont bien voulu s’imposer une contribution en faveur des pauvres parmi les saints (v. 25-26)[1].
Ce n’est pas parce que quelqu’un devient chrétien qu’il devient un être céleste : il a des besoins ! Ecouter des enseignements, prier, chanter des cantiques est très important ; mais cela ne pourra remplacer le soutien dans la vie de tous les jours dont la personne a peut-être besoin. Besoin de consolation, d’encouragement, mais aussi de compagnie, notamment quand la personne est âgée, malade, seule ; ou encore besoin de soutien pratique : aider à déboucher un lavabo, remplir une déclaration d’impôts, mener chez le médecin ou le dentiste, faire des courses, réparer une chaise ou je ne sais quoi encore.
On a bien prêché, on a bien étudié, on a bien chanté, mais on a oublié les plus faibles parmi nous ; ils gémissent dans leur maison. « On est vite oublié », a dit l’un d’eux. Or, c’étaient des membres de Christ ! Cela touche l’unité spirituelle, cela touche le témoignage, cela affecte la crédibilité de notre message. Cela touche la circulation de la grâce au milieu de nous : le corps est malade, il faudrait le soigner…
Si un membre souffre, tous souffrent, dit Paul. Il parle de l’Eglise. Si un membre est honoré, tous les membres se réjouissent avec lui. Cela n’est pas sentimental ; cela vient de Christ qui a voulu que ses disciples prennent également soin les uns des autres afin qu’il n’y ait pas de division dans le corps (1 Co 12.24-26). Il ne s’agit pas ici de division doctrinale, mais d’une division due au fait qu’un membre est seul, comme abandonné, un autre se sent inutile car il est âgé, un autre se sent indigne car il a des problèmes, un autre est gêné car il est démuni, un autre est abattu car il doute… La communion de l’Eglise est en danger ; la coupe qui doit recevoir la bénédiction est ébréchée, fissurée. Elle aura beaucoup de peine à déborder…
Une église peut bien avoir beaucoup d’activités et peu de vie. Nous ne devons pas juger à la manière du monde… Certains de nos frères ou sœurs dans la foi n’attendent-ils pas un signe de fraternité, de soutien ? Peut-être de manière régulière ? Parfois, une organisation est nécessaire. C’est le travail des diacres que de la mettre en place.
Cela touche enfin l’action de grâce et la louange et donc le culte, selon ce qui est écrit : Le secours de cette assistance, non seulement pourvoit aux besoins des saints, mais il est encore une source abondante de nombreuses actions de grâces envers Dieu ! » (2 Co 9.12).
Quand j’aime et visite un frère ou une sœur chrétiens, c’est Christ qui l’aime et qui le visite à travers moi, c’est Christ que j’aime et visite au travers de lui. Combien c’est grand !
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[1] Quand la Bible parle des pauvres, il s’agit toujours des pauvres parmi le peuple de Dieu. (Ac 11.27-30 ; Ga 2.10).