Loriol, le 6 août 2023
VIENNE TON REGNE
Elie nous conduit à réfléchir sur la prière dite ‘dominicale’, le ‘Notre Père’. Je n’ai pas l’intention d’y ajouter mais j’en reprendrai la deuxième proposition en guise d’introduction, avec une simple question : Quand vous prononcez ces quatre mots : « Que vienne ton Royaume » si tant est qu’ils soient repris [durant de très nombreuses décennies, on ne l’entendait pas dans les communautés nées du réveil de la fin du dix-huitième], qu’entendez-vous par là ? Qu’est pour vous cette royauté ?
Rien ne nous empêche de penser à Son désir de régner dans nos cœurs et dans l’église de façon individuelle. Dieu nous entend et cette demande est bonne. Mais il est nécessaire, avant tout, de comprendre ce que Jésus invitait les siens à chercher et à demander. Sans trop de surprise, cela nous conduit à l‘exhortation : Cherchez d’abord la royauté de Dieu et sa justice… » qui fait partie du contexte. En effet, nous sommes invités, nous aussi, à demander et chercher cette royauté. Mais pour en saisir le sens premier, il est bon de nous rappeler que c’est à ses apôtres, tous juifs, et au nom de ce peuple, d’où : Notre Père, que Jésus le disait. Et qu’était l’attente pieuse des Juifs de l’époque ? Anne, rapporte Luc (2.38), parlait de Jésus (que Siméon venait de reconnaître) à tous ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem. Ils savaient cela conforme à la volonté de Dieu et Jésus invitait à demander à Dieu que cette volonté soit faite !
Pour saisir l’importance que l’établissement de ce royaume peut avoir pour nous, il faut remonter dans le temps, jusqu’à Abram.
Inutile de rappeler comment le plan initial de Dieu avait été méconnu d’Adam et Eve à cause de leur désobéissance. Nous savons tous, aussi, comment l’annonce des conséquences était pourtant accompagnée d’une promesse indirecte contenue dans la condamnation du tentateur (Ge 3.15) : Je mettrai inimitié entre toi et la femme, entre ta postérité et sa postérité ; celle-ci t’écrasera la tête, et tu lui blesseras le talon.
Pourtant, le temps passa sans que l’accomplissement de la promesse prenne sens et forme… jusqu’à ce que Dieu invite Abram (de la descendance de Sem, fils de Noé) à quitter son pays pour se rendre dans une terre qu’Il voulait offrir à lui et à ses descendants. (Ge 12.1-3) : L’Éternel dit à Abram : Va-t-en de ton pays, de ta patrie, et de la maison de ton père, dans le pays que je te montrerai. Je ferai de toi une grande nation, et je te bénirai; je rendrai ton nom grand, et tu seras une source de bénédiction. Je bénirai ceux qui te béniront, et je maudirai ceux qui te maudiront; et toutes les familles de la terre seront bénies en toi.
Abraham avait besoin de courage et de foi, car il demeurait à Ur, peut-être la ville la plus prospère de l’époque. La quitter ? pour se rendre où ? Il fit confiance… par étapes : il partit mais pas sans une partie de la famille et s’arrêta à Charan jusqu’à la mort de son père. Là, Dieu répéta la demande : quitte la maison de ton père, c’est-à-dire ta famille… Il se remit en route, mais laissa Lot, son neveu l’accompagner. Je passe sur les péripéties, dont l’Egypte, qui conduisirent enfin Abram à se séparer de Lot.
C’est alors que Dieu précisa l’un des aspects de la promesse (Ge 13.14, 15, 17) : Après que Lot se fut séparé de lui, l‘Éternel dit à Abram : Lève les yeux, et, du lieu où tu es, regarde vers le nord et le midi, vers l’orient et l’occident ; car tout le pays que tu vois, je le donnerai à toi et à ta postérité pour toujours. …/… Lève-toi, parcours le pays dans sa longueur et dans sa largeur ; car je te le donnerai [Laissez-moi poser une question : À qui Dieu promet-il le pays ? C’est important ; mais l’on s’efforce de corriger Dieu. On admet que la postérité d’Abram, c’est le peuple juif et l’on affirme qu’il l’a eu, ce pays, mais que le rejet de son messie a annulé la promesse.
Notre Dieu devait s’attendre à cet oubli, c’est pourquoi il a ajouté à Abram : parcours le pays… car je te le donnerai.
Est-ce qu’Abram l’a un jour possédé ? Tout ce qu’il possédait lorsqu’il mourut, c’était juste un endroit pour enterrer sa femme et quelques puits. Si c’était cela la promesse, Dieu n’est pas très sérieux !
D’autant moins que les écrits de l’Ancien Testament affirment que, faites à Abraham, Issac et Jacob, ces promesses le furent sous serment. En d’autres termes, Dieu les leur a jurées. La Bible le dit plus de 50 foi
La bénédiction des nations à travers Jésus, ultime postérité, cela, personne ne la conteste. Mais quand il s’agit du pays, on ne veut pas le savoir.
Reprenons l’une des premières et la dernière des mention vétéro-testamentaires des promesses (Ge 22.16-18) : C’est l’ange de l’Eternel (Dieu dans sa révélation à Israël) qui parle : Je le jure par moi-même, parole de l’Éternel ! parce que tu as fait cela, et que tu n’as pas refusé ton fils, ton unique, je te bénirai et je multiplierai ta postérité, comme les étoiles du ciel et comme le sable qui est sur le bord de la mer ; et ta postérité possédera la porte de ses ennemis. Toutes les nations de la terre seront bénies en ta postérité, parce que tu as obéi à ma voix.
et Ézéchiel 47.14 : car j’ai juré, la main levée, de le donner à vos pères. Ce pays vous tombera donc en partage.
ll n’est pas inutile de le souligner. Non seulement, l’Eternel l’a juré, mais il l’a fait solennellement de trois manières : par lui-même, (ne pouvant jurer par un plus grand que, dit (Hé 6.13) ; en ces mots : parole de l’Eternel (nous l’utilisons encore parfois (« je t’assure, parole ! ») et la main levée !
On l’a dit, la promesse est passée d’Abraham à Isaac, puis à Jacob et, par la mention d’une grande nation, en la royauté donnée à la maison de David (2 Sa 7.19) : C’est encore peu de chose à tes yeux, Seigneur Éternel, loua David ; tu parles aussi de la maison de ton serviteur pour les temps à venir. Et tu daignes instruire un homme de ces choses, Seigneur Éternel !
En effet, David aura, lui aussi, sa place dans les prophéties qui lui ont succédé et cela non plus, n’est pas encore réalisé : Amos 9.11 : En ce temps-là, je relèverai de sa chute la maison de David, J’en réparerai les brèches, j’en redresserai les ruines, Et je la rebâtirai comme elle était autrefois. Et Ezéchiel 34.23 : Moi, l’Éternel, je serai leur Dieu, et mon serviteur David sera prince au milieu d’elles.
Enfin, pour ne point tout lire, Jérémie 30.7-9, à propos du Jour de l’Eternel : Malheur ! car ce jour est grand ; Il n’y en a point eu de semblable. C’est un temps d’angoisse pour Jacob; Mais il en sera délivré. En ce jour-là, dit l’Éternel des armées, Je briserai son joug de dessus ton cou, Je romprai tes liens, Et des étrangers ne t’assujettiront plus. Ils serviront l’Éternel, leur Dieu, Et David, leur roi, que je leur susciterai.
Pourquoi, un pays, une nation, un royaume ? Il nous faut remonter en arrière. Dieu a aimé Israël. Il lui dit (Dt 7.7, 8) : Ce n’est point parce que vous surpassez en nombre tous les peuples, que l’Éternel s’est attaché à vous et qu’il vous a choisis, car vous êtes le moindre de tous les peuples. Mais, parce que l’Éternel vous aime, parce qu’il a voulu tenir le serment qu’il avait fait à vos pères…
Et dès le temps de l’exode, il dévoila son plan envers eux (Ex 19.5, 6) : Maintenant, si vous écoutez ma voix, et si vous gardez mon alliance, vous m’appartiendrez entre tous les peuples, car toute la terre est à moi ; vous serez pour moi un royaume de sacrificateurs et une nation sainte. Voilà les paroles que tu diras aux enfants d’Israël.
Ce verset est une clé, hors de laquelle nous ne pouvons comprendre le plan divin. Dieu a choisi le peuple d’Israël pour qu’il soit une nation de rois, de sacrificateurs et, selon Joël 2, de prophètes ; même les plus simples et humbles d’entre eux (un avant-goût nous en fut donné à la Pentecôte !).
On n’est pas roi sur rien ; ni sacrificateur pour personne, ni prophète auprès de personne !
Nous n’avons pas oublié ce que Dieu avait promis aux patriarches : la bénédiction, à travers eux, de toutes les familles, de toutes les nations de la terre ! Voilà le but dernier de l’alliance ! le pourquoi de leur choix et de leur triple mandat.
Dieu avait passé alliance ; aussi ajoute-t-il, verset 9 de Deutéronome 7 : Sache donc que c’est l’Éternel, ton Dieu, qui est Dieu. Ce Dieu fidèle garde son alliance et sa miséricorde jusqu’à la millième génération envers ceux qui l’aiment et qui observent ses commandements.
Moïse à qui Dieu le dit ne fut-il pas fidèle ? N’a-t-il pas observé ses commandements ? Nous sommes encore loin des milles générations !
Peut-être pensez-vous que j’oublie un élément important. Dieu avait dit : si vous gardez mon alliance… Or, que de fois ils l’ont abandonnée ! C’est vrai et c’est bien pour cela qu’ils n’ont pas encore pu servir de rois, sacrificateurs et prophètes. Mais aurions-nous raison de conclure que Dieu a renoncé à ses projets à leur égard ? Nous prenons souvent pour nous les projets qui leur sont destinés pour nous les appliquer. Par exemple, Jérémie 29.11… Il est vrai que Dieu a aussi des projets de paix et non de malheur pour nous. Ne sommes-nous pas aussi fils d’Abraham par la foi ? Certes, mais sans permettre que nous en nous oubliions que les promesses sont d’abord pour Israël !
Gardons-nous d’oublier les promesses inconditionnelles que les prophètes lui ont multipliées. Plusieurs montrent qu’elles sont autant de grâces vraiment gratuites. Ainsi en est-il d’Ezéchiel 20, dont je propose les versets 40 à 44 :
. Car sur ma montagne sainte, sur la haute montagne d’Israël, dit le Seigneur, l’Éternel, là toute la maison d’Israël, tous ceux qui seront dans le pays me serviront; là je les recevrai favorablement, je rechercherai vos offrandes, les prémices de vos dons, et tout ce que vous me consacrerez. 41Je vous recevrai comme un parfum d’une agréable odeur, quand je vous aurai fait sortir du milieu des peuples, et rassemblés des pays où vous êtes dispersés ; et je serai sanctifié par vous aux yeux des nations. 42Et vous saurez que je suis l’Éternel, quand je vous ramènerai dans le pays d’Israël, dans le pays que j’avais juré de donner à vos pères.43Là vous vous souviendrez de votre conduite et de toutes vos actions par lesquelles vous vous êtes souillés ; vous vous prendrez vous-mêmes en dégoût, à cause de toutes les infamies que vous avez commises. 44Et vous saurez que je suis l’Éternel, quand j’agirai avec vous par égard pour mon nom, et nullement d’après votre conduite mauvaise et vos actions corrompues, ô maison d’Israël ! dit le Seigneur, l’Éternel.
Si nous prions : Que ton nom soit sanctifié, nous invitons Dieu à tenir ses promesses envers son peuple en les accomplissant malgré ses infidélités.
Comment les accomplira-t-il ? À travers la proposition et le paiement du prix d’une nouvelle alliance. Nous avons la regrettable habitude d’oublier que c’est avec la maison d’Israël et la maison de Juda que cette alliance est faite. Nous disons l’ancienne pour Israël et la nouvelle pour l’Eglise. Si c’est ce que vous croyez, il faut le corriger car s’attribuer une alliance est le meilleur moyen de ne pas comprendre l’action divine. Oui, les deux alliances appartiennent à Israël (Ro 9.4). C’est pourquoi l’alliance qu’établit Jésus, le divin agneau pascal offrant son corps et son sang pour le pardon des iniquités de son peuple est appelée nouvelle. L’ange le redira à Joseph en annonçant la naissance du messie par Marie (Mtt 1.21) : elle enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus ; c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés.
C’est surtout ce qu’avait annoncé Jérémie 31-33, 34 : Mais voici l’alliance que je ferai avec la maison d’Israël, Après ces jours-là, dit l’Éternel : Je mettrai ma loi au dedans d’eux, Je l’écrirai dans leur cœur ; Et je serai leur Dieu, Et ils seront mon peuple. Celui-ci n’enseignera plus son prochain, Ni celui-là son frère, en disant : Connaissez l’Éternel! Car tous me connaîtront, Depuis le plus petit jusqu’au plus grand, dit l’Éternel ; Car je pardonnerai leur iniquité, Et je ne me souviendrai plus de leur péché.
Or, c’est à cause de l’incrédulité persistante d’Israël que le salut, nous est parvenu, à nous païens, sans plus attendre sa conversion pour la mise en œuvre de son mandat missionnaire. Vous êtes ici parce que Dieu vous aime tout autant qu’eux et qu’il vous a étendu sa grâce par sa patience et sa fidélité envers eux.
Voici comment Paul l’a écrit aux Romains (11.1, 11-15) :
1Je dis donc : Dieu a-t-il rejeté son peuple ? Mè genoito : jamais de la vie !
11Je dis donc : Est-ce pour tomber qu’ils ont trébuché ? Loin de là ! Mais, par leur trébuchement, le salut est devenu accessible aux païens, afin qu’ils fussent excités à la jalousie. 12Or, si leur chute a été la richesse du monde, et leur amoindrissement la richesse des païens, combien plus en sera-t-il ainsi quand ils se convertiront tous.13Je vous le dis à vous, païens : en tant que je suis apôtre des païens, je glorifie mon ministère, 14afin, s’il est possible, d’exciter la jalousie de ceux de ma race, et d’en sauver quelques-uns.
Il ne me reste pas assez de temps pour en dire beaucoup plus. Mais je veux laisser la parole un moment à l’apôtre Pierre (Actes 3.19-21). Il parlait aux Juifs de Jérusalem, c’est vrai ; mais les fruits de la nouvelle alliance sont aussi pour nous païens :
Repentez-vous donc et convertissez-vous, pour que vos péchés soient effacés 20afin que des temps de rafraîchissement viennent de la part du Seigneur, et qu’il envoie celui qui vous a été destiné, Jésus Christ, 21que le ciel doit recevoir jusqu’aux temps du rétablissement de toutes choses, dont Dieu a parlé anciennement par la bouche de ses saints prophètes.
Après le premier discours de Pierre, des Juifs de Jérusalem et ceux venus pour la fête depuis les divers points de la dispersion, lui dirent ainsi qu’aux autres apôtres : Hommes frères, que ferons-nous ?
Nous avons tout autant à nous interroger. Les signes du retour du Seigneur sont nombreux. Quelle doit être notre attitude ? Nous assurer d’abord que nous avons accueilli la grâce du pardon de nos fautes dans la double reconnaissance : aveu de notre culpabilité et expression de la joie de l’accueil. C’est aussi avoir pour préoccupation première le souci d’être réellement raison de jalousie pour le peuple juif, prier pour sa conversion et pour l’accomplissement de son attente messianique. C’est se rappeler qu’il s’y est toujours trouvé un résidu fidèle et maintenant, celui qui, demain, le règne du Christ enfin établi, portera la connaissance de l’Eternel à tous les peuples de la terre.
Son triple mandat est merveilleux. Le nôtre l’est-il moins ? Que Dieu nous en rende dignes. Maranatha.